Un tribunal de Kiev confirme que les snipers de Maidan ont ouvert le feu depuis l’hôtel Ukraina
Source: Multipolar Magazin (Anglais)
Auteur: Stefan Korinth
23.02.2024
Il y a dix ans, un massacre perpétré par des officiers de police et des activistes de la révolution de Maidan embrasait la place Maidan et fut à l’origine du putsch contre le gouvernement ukrainien deux jours plus tard. Dans son interview accordé à Multipolar, le politologue Ivan Katchanovsky de l’Université d’Ottawa analyse le cours des événements, les preuves disponibles, le rôle ambigü de la chaine allemande ARD, ainsi que les révélations faites récemment par un tribunal de Kiev statuant sur ce meurtre de masse. Les juges purent établir que les tireurs, des révolutionnaires de Maidan d’extrême droite, ouvrirent le feu depuis l’hôtel Ukraina ainsi que depuis d’autres endroits, et qu’ils sont responsables de la mort d’au moins dix personnes.
Multipolar: M. Katchanovski, ce mois de février marque l’anniversaire du massacre de la place Maidan le 20 février 2014, le violent changement de gouvernement à Kiev pour un gouvernement favorable à l’Occident deux jours plus tard et l’invasion russe de l’Ukraine le 24 février 2022. Dans quelle mesure peut-on dire qu’une fil rouge politique conduit des événement de février 2014 à cette guerre survenue huit ans plus tard ?
Katchanovski: Comme je l’ai écrit dans un article (disponible en accès libre dans une revue à comité de lecture), le massacre de Maidan a conduit au renversement du gouvernement pro-russe de Viktor Yanukovych, et a été à l’origine de la guerre civile dans le Donbass. C’est là que s’origine aussi le conflit entre l’Ouest et la Russie, entre l’Ukraine et la Russie, que celle-ci, en envahissant l’Ukraine le 24 février 2022 a fait dégénérer.
Poutine n’est pas le seul, dans son interview avec Tucker Carlson a affirmé que ce massacre de Maidan a joué un rôle clé dans les origines du conflit russo-ukrainien. Ursula Von der Leyen, la Présidente de la Commission Européenne est arrivée aux mêmes conclusions.
Multipolar: Pouvez-vous rapidement rappeler comment ce massacre de masse survenu à Kiev le 20 s’est déroulé. Qui étaient les victimes ? Qui les coupables ? Quels sont les sources et les informations fiables dont nous disposons ? Qu’ont permis d’établir vos recherches ?
Katchanovski:
Ce sont des snipers d’extrême droite du groupe Maidan qui ont initié le massacre en rompant un accord de cessez-le-feu. Ils ont alors tué 3 personnes et blessé 39 policiers membres de la police anti-émeute Berkut et des agents des brigades intérieures de Maidan, au matin du 20 février.
Mes recherches autant que le verdict du tribunal statuant sur ce massacre ont montré que cette attaque meurtrière a conduit la police anti-émeutes (elle n’est pas armée alors) et les agents des brigades intérieures à se replier rapidement de la place Maidan. Les activistes de Maidan les ont alors pourchassé, entraînant la mort de l’un d’entre eux et deux blessés, tous par un seul activiste. Une section spéciale des unités anti-émeutes Berkut, armée elle, a fait une courte intrusion sur la place pour assurer la sécurité des brigades intérieures. C’est à ce moment-là que les activistes de Maidan furent massacrés.
Le verdict du tribunal put établir que.
“Le 20 février 2014, 113 officiers de police furent blessés à divers degrés de gravité (coups et blessures, commotions cérébrales, fractures, empoisonnement, brûlures), 4 furent tués par balles,, et 63 au total furent blessés par armes à feu. 233 activistes furent aussi blessés plus ou moins gravement 49 d’entre eux trouvèrent la mort, dont 48 par balles. Au total 172 activistes portaient des blessures occassionées par des armes à feu”.
Mon article, récemment paru dans une revue à comité de lecture et intitulé “Le massacre des snipers de la place Maidan en Ukraine” résume ce que mes recherches ont permis d’établir :
“Des vidéos prises au moment des faits, des témoignages de plusieurs centaines de témoins, les confessions de 14 membres appartenant au groupe des snipers de Maidan ainsi que les impacts de balle ont montré que la police et les manifestants furent tous massacrés par les snipers de Maidan, positionnés dans les zones et les immeublres contrôllés par la révolution Maidan.
Les analyses des bandes vidéos tournées ce jour-là, permirent d’établir que l’horaire et la trajectoire des tirs de la police anti-émeute Berkut, accusée du massacre, ne pouvaient correspondre au meurtre des manifestants tués. Une thèse corroborée par les témoignages de l’écrasante majorité des manifestants blessés et de la centaine de témoins, ainsi que par les analyses balistique et de médecine légale conduites par des experts lors du procès. Cet article établit que le massacre perpétré sous faux-drapeau fut orchestré de façon très organisée et possible grâce à l’implication d’éléments appartenant à l’oligarchie et au courant d’extrême-droite de l’opposition Maidan, implication visant à renverser le gouvernement en exercice en Ukraine”.
Dans deux autres articles, parus eux aussi dans des revues à comité de lecture et en libre accès, j’en expose la preuve irréfutable : “Le tribunal du massacre de Maidan et les révélations de l’enquête : conséquences dans les relations et la guerre russo-ukrainiennes ; ainsi que : “L’extrême-droite, l’Euromaidan et le massacre de Maidan en Ukraine”. Des vidéos y sont aussi mises à disposition. Cette année verra aussi la publication de deux de mes ouvrages chez deux éditeurs universitaires majeurs, où cette preuve sera aussi exposée.
Le retrait des forces de police, conséquence du bain de sang du centre-ville.
Multipolar: Deux jours plus tard, le président Viktor Yanukovych fut, de façon tout à fait inconstitutionnelle, déposé. Quel rôle a joué le massacre dans cette déposition ?
Katchanovski: L’opposition de Maidan, les gouvernements occidentaux et les médias ukrainiens et occidentaux accusèrent aussitôt Yanukovytch, des snipers à sa solde, et la police anti-émeutes de ce massacre. Celui-ci entraîna le vote du Parlement le 20 février, entérinant le retrait des forces gouvernementales du centre de Kiev, et par voie de conséquence, le vote pour la destitution de Yanukovych et de son gouvernement. Ce vote fut opéré en totale violation de la Constitution ukrainienne, et malgré la manipulation des résultats (on fit voter des députés absents et des membres des snipers d’extrême-droite firent pression sur de nombreux députés), le nombre de votants pour la destitution fut insuffisant.
Multipolar: Une décision de justice relative au massacre du 20 février2014 fut récemment rendue publique. Pouvez-vous nous expliquer en quoi consistait l’accusation ?
Katchanovski: Le bureau du procureur général d’Ukraine (GPU) accusa 5 membres de la police anti-émeutes d’avoir tué 48 des manifestants ainsi que d’avoir essayé de tué 80 des manifestants blessés le 20 février 2014. Et ce au moyen d’une attaque de type terroriste. Voilà pour les accusations principales.
Multipolar: Sur quoi le tribunal focalisa-t-il son enquête ?
Katchanovski: Le tribunal n’examine que les charges pesant sur 5 des membres de la police anti-émeutes Berkut pour le massacre d’activistes de Maidan. Il n’examina pas et ne procéda à aucune enquête sur le massacre perpétré sur les policiers pas plus que sur celui commis par les snipers de Maidan.
Multipolar: Quels furent les points les plus importants du verdict ?
Katchanovski: Le verdict permit de confirmer que de nombreux activistes de Maidan, ainsi que des journalistes de la BBC et de la chaîne ARD furent abattus non par des membres des forces spéciales ukrainiennes Berkut ou d’autres forces de maintien de l’ordre, mais par des snipers opérant depuis l’hôtel Ukraina contrôlé par la milice d’extrême-droite Svoboda et d’autres lieux contrôlés par les révolutionnaires Maidan. Il put établir en particulier que l’hôtel Ukraina était sous contrôle d’activistes de Maidan et que la milice armée du groupe Maidan, proche de l’extrême-droite, était présente dans l’hôtel et fit feu depuis là. Le verdict conclut de façon “catégorique qu’au matin du 20 février 2014 des hommes en armes, celles précisément à l’origine des coups de feu, étaient dans les locaux de l’hôtel Ukraina”.
La décision du tribunal précise que faute de preuve, on ne peut établir l’implication des forces anti-émeutes Berkut et d’autres officiers des forces de l’ordre dans le meurtre de 9 personnes et les blessures occasionnées à 23 activisites de Maidan, une lacune autorisant la thèse selon laquelle ces victimes auraient pu être la cible de “personnes non identifiées”.
Le verdict put établir qu’au moins 6 manifestants furent en particulier tués, et beaucoup d’autres blessés à partir de l’hôtel Ukraina contrôlé par les activistes et d’autres lieux sous contrôle de Maidan. L’Euromaidan, conclut ce rapport, n’était donc pas au moment du massacre une manifestation pacifique mais une révolte impliquant le massacre de la police anti-émeutes Berkut et l’assaut donné par des activistes de Maidan.
Yanukovych ne donna pas l’ordre de tirer. Aucune implication de la Russie.
Ce verdict put aussi confirmer mes conclusions, démontrant que Yanukovych ou ses ministres ne donnèrent jamais l’ordre à l’origine du massacre ainsi que la non-ingérence de la Russie dans ce tragique événement.
Il établit en particulier que la “marque de la Russie” ne pouvait être confirmée à partir des documents examinés, à savoir notamment tous les relevés de passage de frontière par des officiers du FSB en Ukraine (constamment sous surveillance) leurs déplacements autour de Kiev et dans la région, les jours et les lieux de leur séjour, les dates et les modalités de leur départ du territoire ukrainien, de sorte qu’aucune implication dans ce massacre ne puisse leur être imputée.
Deux officiers de Berkut furent acquittés de l’accusation de meurtre pesant sur eux. Trois autres, qui firent sur les ordres de Zelensky échangés avec des séparatistes du Donbass, furent condamnés par contumance pour le meurtre de 36 manifestants (sur 49), et pour avoir occasionné des blessures à 52 activistes de Maidan (sur 172). Cette condamnation fut établie sur la base d’un seul examen de médecine légale monté de toutes pièces, et au bénéfice de l’argument de la responsabilité collective.
De la même façon, un commandant des unités Berkut fut aussi condamné pour le meurtre de quatre manifestants et des blessures occasionées sur huit autre participants, ainsi que pour avoir donné l’ordre à ses officiers d’ouvrir le feu à l’aveugle durant l’évacuation des troupes intérieures opérée par les unités Berkut, et leur retraite consécutive à la mort d’un officier des Berkut (un autre fut également blessé à ce moment-là).
Un faisceau de preuves établit que les unités Berkut ne peuvent avoir tiré sur les manifestants.
Cet examen balistique de médecine-légale, conduit cinq ans après le massacre, vint contredire la quarantaine de ceux précédemments conduits, incluant une étude assistée par ordinateur ayant montré que les balles extraites des corps des manifestants de Maidan ne pouvaient être celles des fusils d’assaut Kalashnikov utilisés par les forces Berkut.
L’analyse balistique montée de toutes pièces contredit aussi les vidéos prises sur le vif qui montrent clairement que les officiers des unités Berkut n’ont pas ouvert le feu au moment où la plupart des manifestants ont été tués. De même, elle vient contredire les investigations conduites sur place par des experts balistisques gouvernementaux, concluant à des trajectoires de balles provenant des zones contrôlées par des activistes Maidan. Enfin, cette étude est contraire aux résultats d’enquête de médecine-légale permettant de déterminer les trajectoires de balles établies à partir des blessures des victimes (balles venant de côté, d’en haut, par derrière) ainsi qu’aux témoignages de l’écrasante majorité des manifestants blessés à Maidan, de centaines de témoins de la défense ou de l’accusation ayant attesté la présence de snipers à l’hôtel Ukraina ou dans d’autres zones sous contrôle Maidan.
Autant de preuves démontrant avec clarté que les policiers de Berkut ne pouvaient physiquement avoir tiré sur les manifestants, alors que dans de rares autres cas les preuves, à charge ou décharge, font défaut.
Le verdict constitue une reconnaissance officielle des faits, que le gouvernement continue de nier.
Le verdict du tribunal ukrainien, ainsi que les découvertes à l’issue de l’enquête de Bureau du Procureur Général ukrainien impliquent une reconnaissance officielle de facto, par le système judiciaire lui-même (au demeurant pas totalement neutre) de l’assassinat d’au moins 10 (sur 49) activistes de Maidan le 20 février 2014 par les snipers de Maidan depuis les zones sous leur contrôles et non par les unités Berkut ou d’autres membres des forces de l’ordre. De même pour les blessures occasionnées sur 115 manifestants (sur 172). Les enquêtes conduites par le gouvernement ukrainien lui-même ont admis qu’un des manifestants et la moitié des blessés au sein des activistes furent ciblés à partir de zones non contrôlées par les forces Berkut, de sorte qu’aucune charge n’ait pu être reconnues contre elles, alors même que le gouvernement continuait de nier la présence de snipers dans les zones contrôlées par Maidan.
L’étrange rôle de la chaîne ARD
Multipolar: Pour la chaîne de grande diffusion qu’est ARD, le massacré perpétré à Maida fut toujours un sujet traité comme fait marginal -alors même que les combattants Maidan avaient même pris position dans une chambre de la chaîne allemande ZDF dans l’hôtel Ukraine le 20 février 2014, et ouvert le feu depuis une fenêtre en direction de la zone du massacre rue Institutska. En relayant l’information, à la seule exception du Monitor, les médias allemands développèrent la thèse à plusieurs reprises selon laquelle Yanukoych et les forces Berkut étaient à l’origine du massacre, absolument comme si vos enqueêtes et vos conclusions n’avaient pas du tout existé. Qu’en est-il des principaux médias anglophones ? Les thèses sur ce massacre ont-elles évolué depuis ces dix dernières années ?
Katchanovski: Au tribunal, une longue vidéo de la chaîne ARD fut d’abord présentée de façon anonyme par les avocats des victimes. Ce n’est qu’après quelques années que le tribunal put établir qu’il s’agissait d’une vidéo tournée par l’ARD. Dans les résaux sociaux, un journaliste ukrainien indiqua être à l’origine de cette vidéo, tournée pour le compte de l’ARD. Il précisa que la chaîne avait refusé sa diffusion au tribunal en Ukraine, et que celle diffusée devant les juges avait fait l’objet de coupes, et que la bande son avait été supprimée.
Son contenu recoupe les affirmations du journaliste, à savoir que la vidéo fut filmée depuis la chambre louée par la ZDF à l’hôtel Ukraina, chambre depuis laquelle des snipers de la section Maidan (affiliée à l’extrême-droite) avaient été filmés en train de tirer sur les manifestants de Maidan. Cette vidéo ayant enregistré le meurtre et les blessures occasionnés sur une grande partie des manifestants ainsi que le positionnement des unités Berkut, la bande son manquante des détonations aurait permis de démontrer que les moments précis des tirs sur les manifestants coïncidaient avec ceux, sonores et proches de l’hôtel contrôlé par Maidan et non avec ceux tirés par les unités Berkut depuis leur lointaines barricades.
Le verdict put établir que deux des chambres de l’hôtel furent prises pour cibles depuis le Conservatoire de Musique et la Poste toute proche, zones occupées par des activistes Maidan. Mais il omit de mentionner que ces chambres furent youtube.com/watch par des journalistes de la chaîne allemande ARD, et que la poste était le QG du Secteur Droit.
« Les média occidentaux diffusent un narratif erroné sur le massacre »
A de très notables exceptions près, un black-out est toujours de rigueur dans les principaux media anglophones touchant mes recherches académiques, mes révélations sur les snipers de Maidan au tribunal y étant consacré et à l’enquête conduite en Ukraine ainsi que touchant les confirmations du tribunal sur la présence des snipers Maidan.
Le New York Times, comme d’autres grands media occidentaux ont propagé un narratif erroné sur le massacre de Maidan. Deux reportages de la BBC montrant des snipers de Maidan dans l’hôtel Ukraina en train de tirer sur l’équipe de la BBC TV et les manifestations constituent de très notables exceptions. Mais la BBC, comme tous les autres medias occidentaux principaux n’ont pas mentionné la reconnaissance par le gouvernement ukrainien lui-même après enquête que la chambre était occupée par des leaders du parti d’extrême-droite Svoboda. De même, elle omis de dire que le verdict du tribunal sur le massacre établit que la vidéo de la BBC ayant enregistré la fusillade constituait des “données documentées de l’hôtel Ukraina à Kyev contrôllé par les activistes quant à l’utilisation ciblée par les activistes d’objets très similaires par leurs caractéristiques visibles à des armes à feu, de type armes de chasse”.
Ce silence délibéré sur les révélations du tribunal du massacre de Maidan, sur le verdict lui-même, et sur mes études académiques se poursuit en dépit des 1.000.000 mots constituant le verdict du tribunal du massacre de Maidan, en dépit de la mise dans le domaine public de sa version anglaise en présentant les extraits les plus remarquables, et en dépit des 1.000.000 de visionnages et de téléchargements dont mes études ont fait l’objet (incluant des vidéos de snipers de Maidan, de témoignages de l’écrasante majorité d’activistes blessés et de plus de 150 témoins pouvant attester de la présence de snipers). Enfin, ce silence se poursuit en dépit du caractère viral de tous les tweets que je poste sur ce sujet.
Pire que cela, dans son éditorial paru sur le site néo-conservateur Bulwark, Cathy Young présente de façon erronnée le verdict, affirme faussement qu’il atteste de la responsabilité des forces de police Berkut dans la mort de 40 manifestants sur 48, de même qu’elle dénie et omet purement et simplement de mentionner l’existence de snipers Maidan et l’implication des mouvements d’extrême-droite, rejetant ses thèses sous l’étiquette de “théories du complot”.
Etiquettés “théories du complot”, les thèses de la présence des snipers Maidan à l’hôtel Ukraina sont rejetées, et Cathy Young affirme faussement que le verdict n’affirme pas que les manifestants furent tués depuis l’hôtel ou d’autres zones sous contrôle Maidan, et que le verdict n’exclue pas l’implication de snipers russes.
Elle affirme la contre-vérité selon laquelle l’hôtel Ukraina n’était pas sous contrôle des activistes Maidan, propageant elle-même la théorie du complot selon laquelle la police dans l’hôtel pouvait avoir tué les manifestants. Cela contre toute évidence, claire autant qu’écrasante, apportée autant par le verdict, le tribunal, l’enquête, que mes études académiques.
Multipolar: Vladimir Poutine, dans la récente interview qu’il a accordée à Tucker Carlson, a affirmé que la CIA était responsable de ce “coup” en 2014 à Kiev. Pensez-vous que des preuves, et de quel type, peuvent exister en faveur de cette thèse ?
Katchanovski: Ma propre enquête ne m’a pas permis de trouver une preuve accessible de l’implication de la CIA dans le massacre de Maidan ou dans la destitution brutale du gouvernement ukrainien. Poutine, au demeurant, ne présente pas non plus cette preuve. Il prétend fautivement qu’il s’agit là d’un “coup fasciste”, et qu’un régime néo-nazi s’est alors installé en Ukraine.
Nous possédons cela dit diverses preuves attestant que cette destitution vient refléter la politique américaine en matière de changement de régime. Deux leaders du parti d’extrême-droite Svoboda ont affirmé dans des interviews distincts qu’un représentant d’un gouvernement occidental leur avaient assuré que les gouvernements de l’Ouest seraient en capacité de destituer Yanukovych si les victimes parmi les manifestants atteignaient la centaine d’individus. Or, les manifestants tués furent, sitôt après le massacre, appelés les “Cent célestes”. Des manifestants ainsi que d’autres personnes absentes ce jour-là à Maidan et victimes de maladies ou d’autres causes furent incluses dans ce nombre pour lui faire atteindre la limite de 100.
Les Etats-Unis et d’autres gouvernements occidentaux imputèrent le massacre au gouvernement Yanukovych à ses troupes, et ils reconnurent le nouveau gouvernement Maidan.
Dans son récit biographique, Biden rapporte avoir téléphoné à Yanukovych alors que “ses snipers assassinaient des citoyens ukrainiens par douzaines” pour lui dire de “rappeler ses hommes et se retirer” et que “le président en disgrâce quitte l’Ukraine dès le lendemain”.
Yanukovych signa le 21 février un accord avec les leaders de l’opposition Maidan et des représentants de la France, de l’Allemagne, de la Pologne.
Yanukovych signed a deal with the Maidan opposition leaders and representatives of France, Germany, and Poland on 21 February. Puis plus tard le Président Obama déclara sur CNN que “nous avons négocié un accord de pouvoir de transition en Ukraine”;
Multipolar: Vous vivez et travaillez au Canada depuis plus de 20 ans. Une large communité d’exilés ukrainiens y réside. En septembre 2023, le Parlement canadien a ovationné Yaroslav Hunko, vétéran ukrainien de la SS, invité par le Premier Ministre Justin Trudeau and le Président du Parlement de l’époque, Anthony Rota. Rota célébra Hunko comme étant un “héros canadien-ukrainien” qui avait combattu contre “les russes” lors de la deuxième guerre mondiale. Peu après, il prit ses distances par rapport au scandale et qualifie “d’erreur” la célébration de l’ancien SS. Comment expliquez-vous qu’une telle “erreur” puisse se produire ?
Katchanovski: Mes tweets, viraux sur le net et tous fondés sur des recherches ont identifié ce vétéran comme ayant appartenu à la division SS Galicie. Mes interviews dans les principaux medias canadiens à propos de cette affaire ont joué un rôle important pour la rendre publique. Je n’ai pas de preuve permettant de dire que le Président du Parlement Canadien, le Premier Ministre ou d’autres officiels canadiens savaient qu’ils invitaient et ovationnaient publiquement à un vétéran de la division SS Galicie. Mais la propagande en cours dans la guerre russo-ukrainienne et le blanchiement de néo-nazis et de collaborateurs nazis en Ukraine ont contribué à cette débâcle épique.
« Selensky est un opportuniste politique »
Multipolar: Le Président ukrainien Zelensky était aussi présent ce jour-là au Parlement Canadien et il a aussi applaudi Hunko. Comment expliquer qu’un ukrainien, ayant des racines juives, puisse honorer un ancien SS ?
Katchanovski: Aucune preuve là encore que Zelensky savait qu’il ovationnait un vétéran de la division SS Galicie. Mais la présentation de ce vétéran par le Président du Parlement Canadien comme ayant combattu “les russes” pendant la deuxième guerre mondiale était un élément suffisant, pour chacun, Zelensky inclus, pour réaliser que ce vétéran de guerre ne pouvait qu’être un collaborateur nazi.
Zelensky n’a toujours pas cela dit condamné publiquement, ou même commenté cette débâcle, même après que Poutine ait utilisé cet événement pour étayer sa -fausse-preuve d’une Ukraine nazie ou néo-nazie, ou pour justifier l’invasion illégale de l’Ukraine. A l’évidence, Zelenzky n’est ni un nazi, ni un néo-nazi, mais un opportuniste politique. Il tente de contenir et d’intégrer l’extrême-droite, néo-nazis inclus, qui considèrent la SS Galicia et d’autres collaborateurs nazis comme des héros ukrainiens, et qui ont le pouvoir de renverser Zelensky.